Solveig Serre
Revue de musicologie, 96, p. 73-89. [ISSN 0035-1601]
Année de publication : 2010

Entre 1778 et 1780, l’Académie royale de musique est dirigée par Anne-Pierre-Jacques de Vismes du Valgay, jeune entrepreneur qui n’appartient ni au milieu artistique ni au milieu intellectuel, mais au monde des manieurs d’argent et des grands financiers. S’il manifeste la faveur dont Vismes jouit auprès de la reine Marie-Antoinette, il est aussi une tentative du pouvoir royal de se débarrasser d’un dossier encombrant et d’assainir les finances de l’établissement. Si l’épisode s’achève vite et mal, il est particulièrement intéressant à étudier. Du point de vue administratif tout d’abord, il révèle l’impossibilité de confier un grand établissement culturel à un particulier et la nécessité pour l’État de s’impliquer dans sa gestion. Du point de vue artistique, il permet à la révolution artistique initiée par Gluck de trouver son plein aboutissement. En ce sens, et pour la première fois de son histoire, l’Opéra de Paris peut se prévaloir d’avoir eu à sa tête un véritable directeur, préfigurant les grands gestionnaires des XIXe et XXe siècles.